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Le refuge du Goûter sur la voie royale !

Le célèbre refuge du Goûter, le point de départ vers l'ascension finale vers le sommet du Mont Blanc est perché à 3817m au sommet de l'Aiguille du Goûter, le refuge est occupé de juin à septembre par des grimpeurs de tous horizons désireux de faire l'ascension du Mont Blanc. Il va sans dire que pour gérer le refuge, il faut une solide expérience.


alpinisme.com : Nadine et Claude, vous êtes les gardiens de ce refuge.
Qu'elles en sont les contraintes ?


Dans un refuge tel que le Goûter les contraintes sont de plusieurs ordres :
D'abord ce sont les contraintes liées à l'isolement et à l'altitude : Approvisionnements par héliportage souvent difficiles (vent, météo?), climat rude, déneigement manuel important (+ de 700 m3 !) tout au long de la saison, fatigue due à la vie constante en altitude.

Deuxièmement, le refuge du Goûter étant très fréquenté, la difficulté est d'accueillir au mieux le public avec les 100 places dont nous disposons. Dès l'ouverture des réservations en avril, les demandes sont très nombreuses et comme nous n'acceptons personne en surnombre, et il faut vite leur opposer de nombreux refus et cela ne se fait pas sans mécontentement et incompréhension des clients et des guides.
Pendant la saison, il faut gérer les alpinistes qui n'ont pas réservé, offrir à chacun accueil, restauration et repos avec le peu de place disponible.
La clientèle étant parfois néophyte en matière de vie dans un refuge, il est nécessaire d'effectuer un travail d'information pour que chacun puisse passer un moment agréable au refuge.

S'ajoute à cela le contexte de haute montagne, avec les impératifs d'accueillir parfois des gens en difficulté physique ou morale, ou des alpinistes blessés. Le mot refuge trouve alors entièrement son sens.

Enfin, un refuge est une véritable entreprise et nous avons également à gérer une équipe d'employés aide-gardiens (4 à 5 employés ) qui travaillent dans des conditions difficiles : promiscuité importante dans le travail et l'intimité, horaires lourds, repos difficile à cause du bruit. Ces personnes nécessitent une attention particulière car le bon fonctionnement du refuge repose avant tout sur une bonne entente et une excellente coopération au sein de l'équipe.


Vous devez être des passionnés de la Montagne et de l'accueil, Comment êtes-vous devenus gardien de refuge ?

La passion de la montagne est effectivement nécessaire pour se sentir bien dans un milieu comme celui de l'Aiguille du Goûter, mais il faut savoir la mettre entre parenthèses car le travail de gardien de refuge nous fixe constamment à l'intérieur des locaux et nous mettons très rarement les pieds sur les glaciers pourtant tout proches.
Il est encore bien plus important d'apprécier son bâtiment et de s'y sentir bien.

L'accueil en refuge se situe à la rencontre de la passion de la montagne, l'envie d'accueillir, de transmettre et de faire partager les connaissances sur ce domaine montagnard, et aussi le plaisir de cuisiner !

Nous sommes venus progressivement dans ce secteur d'abord en abordant l'accueil en chambres d'hôtes, avec une clientèle de personnes en déplacements professionnels ou en stages, tout à fait en dehors du secteur de la montagne. Puis grâce à des rencontres, notamment avec Pierre Lombard (malheureusement disparu depuis ) et Bernadette Lombard qui gère toujours le gîte dans le village de Larche en Ubaye, nous avons pris pleinement conscience que ce métier exigeant nous plaisait.
S'est alors présentée en 2004 l'opportunité de garder le refuge CAF du Promontoire.


Aujourd'hui, il faut une solide formation pour devenir gardien de refuge, quel est votre parcours ?

Après une scolarité classique (Prof. Des Ecoles et Deug Physique), nous nous sommes tous deux orientés vers les métiers de la montagne (accompagnatrice moyenne montagne et guide de haute montagne).
Après avoir géré pendant 8 ans des chambres d'hôtes en Chartreuse puis pendant 5 ans le refuge du Promontoire en Oisans, nous avons l'opportunité et la chance d'accéder à cette expérience difficile, mais unique.
Au cours de notre expérience professionnelle, nous avons suivi quelques formations sur la comptabilité et les métiers de l'accueil.
Nous avons également suivi la formation de gardiens de refuge en 2007 et sommes tous les deux titulaires du diplôme.
La particularité de ce refuge est également son caractère international et une grande partie des échanges avec les clients se traite en langue étrangère, notamment l'anglais et l'espagnol.


Au niveau de l'eau, du chauffage, des toilettes, comment fonctionnez-vous ?

En haute altitude, nous ne disposons bien entendu d'aucune source et nous ne sommes pas reliés au réseau d'eau communale ! L'eau est obtenue par fonte de la neige sur le toit. Elle y est présente en début de saison, puis nous alimentons manuellement ensuite la zone de récupération. L'eau est stockée dans des citernes à l'intérieur du refuge, puis traitée. Cela oblige à une nécessaire économie dans tous les domaines.
Le refuge ne dispose pas de système de chauffage. En cas d'affluence, la température monte naturellement, les volumes étant restreints.
Lors des journées de mauvais temps, par contre, la température avoisine 0° C à l'intérieur.
Seule la cuisine qui dispose d'un système au charbon pour chauffer l'eau sanitaire conserve une température supportable.
La gestion des toilettes est jusqu'à présent un point noir. Les clients disposent de 4 urinoirs et 4 WC. Autant le nettoyage des urinoirs est aisé, autant celui des WC est une horreur. Le système n'est constitué que d'un tuyau ouvrant sur le vide. Le problème étant que l'arête du Goûter est presque continuellement balayée de puissants vents ascendants. Je vous laisse imaginer le résultat.
Un nouveau système doit être mis en place en 2009. Affaire à suivre !


Qu'attendent les alpinistes en venant ici ?

Les alpinistes attendent un lieu d'accueil chaleureux afin de pouvoir se reposer avant d'aborder l'ascension du Mt Blanc. Ils attendent de nous les renseignements nécessaires pour que ce repos soit le plus réparateur possible. Nous les guidons vers leur dortoir, les informons de l'heure du repas et du petit-déjeuner.
Certains ont besoin de réconfort en cas de défaillance physique liés à l'altitude.
D'autres ont besoin d'être réchauffés en cas de grosse tempête dehors.
Les alpinistes ayant des problèmes de matériel attendent de nous un prêt d'outils ou des idées pour une réparation sommaire mais efficace.
En cas de météo incertaine, les alpinistes attendent également notre avis sur la question.
En cas d'accident, nous faisons souvent le lien avec les secours et gérons la sécurité lors des évacuations proches du refuge.
Certains alpinistes sont curieux de la vie que nous menons au refuge et nous questionnent. Malgré la fréquentation importante du refuge, il est rare de ne pas avoir pu échanger cordialement avec au moins un des membres de l'équipe des gardiens


Avez-vous un rôle de conseil auprès des alpinistes ?

En matière d'alpinisme, la particularité du refuge du Goûter est qu'il ne dessert qu'une seule voie normale sur un seul sommet ( le Mont Blanc ) Les choses sont donc assez simples : conseils sur les conditions de la montagne : présence de glace, neige, risque d'avalanche, conditions de l'itinéraire de montée au refuge par l'Aiguille du Goûter. Néanmoins, les alpinistes sont parfois peu expérimentés et mesurent peu la difficulté d'un tel itinéraire, qui est certes abordable par beaucoup, mais qui présente aussi des difficultés et des risques (froid et vent souvent très intenses en haute altitude, risque de se perdre en cas de brouillard ). Un panneau d'information sur l'itinéraire de la voie normale du Mont Blanc a été installé dans le refuge et il est très apprécié. Les informations météo sont également tenues à jour et affichées. Les alpinistes viennent à 50% accompagné d'un guide. Ce dernier doit être aussi le relais des gardiens et nous signaler parfois des alpinistes mal équipés ou en difficulté.


Quel est votre meilleur souvenir au refuge du goûter ?

Un souvenir qui n'a rien de spécialement montagnard. Une équipe de 4 russes est passée l'an dernier au refuge. Ils sont montés avec la guitare sur le sac à dos. L'un d'entre eux est chanteur professionnel.
Nous nous sommes tous retrouvés dans la cuisine au bout d'un moment après avoir sympathisé. Ils ont commencé par nous faire leur répertoire en russe et on a fini par des chansons de Brassens en russe et en français? Et la guitare est restée au refuge pour la prochaine fois !
Plus incroyable, vers la fin août une jeune fille violoncelliste de profession est montée avec son instrument sur le dos avec l'intention d'aller jouer au sommet du Mont Blanc. Une fois encore cela s'est terminé par un petit concert au refuge.
D'une façon générale et au delà de l'alpinisme proprement dit, c'est la variété et la diversité des rencontres qui fait la richesse d'un refuge tel que celui-ci.


Votre pire souvenir ?

La nouvelle de l'accident du Tacul l'année dernière.


Une phrase pour définir la montagne ?

La montagne c'est comme la glace à la vanille : C'est blanc, c'est froid, mais qu'est-ce qu'on aime ?.


Nadine et Claude, merci pour votre disponibilité.

Interview Réalisé par Christian COUSIN